Alain Lobognon, ex-ministre ivoirien des Sports, et acteur de la douloureuse crise qu’à connue la Côte d’Ivoire entre 2002 et 2011, a invité tous les acteurs de cette page noire de l’histoire du pays à emprunter la voie du dialogue pour mettre définitivement fin aux suspicions qui demeurent encore présentes dans le coeur des Ivoiriens.
Alain Lobognon invite Ouattara, Soro, Gbagbo et Bédié à se parler
Cette sortie du ministre Alain Lobognon intervient 8 ans, jour pour jour (11 avril 2011- 11 avril 2019), après la capitulation de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo, alors que ce dernier, sous le feu des bombardements des Forces françaises et onusiennes, était retranché dans un bunker à la résidence présidentielle. A en croire l’ancien député de Fresco, une reconciliation véritable en terre d’Eburnie ne saurait être possible qu’après un dialogue direct et sincère entre les Présidents Ouattara, Bédié, Laurent Gbagbo et l’ex-Premier ministre Guillaume Soro.
Cette démarche, a-t-il rappelé, dans une contribution relayée sur sa page Facebook, a déjà fait ses preuves. Notamment en 2003, avec les accords de Linas Marcoussis, et en 2007 pour l’Accord politique de Ouagadougou. Ci-dessous l’intégralité des propos de l’ancien membre de la rebellion du MPCI.
Le 11 avril 2019 est arrivé.
Comme chaque année depuis 2011, les uns se souviendront de l’arrestation, ce jour-là, de Laurent Gbagbo, ancien Président de la République, élu le 22 octobre 2000.
Les autres vont s’enfermer dans certains épisodes douloureux de la page noire de l’histoire de la Côte d’Ivoire sans cesse chantée, selon le camp, le parti politique, le lieu, la date, les séquences.
Pour l’histoire, Laurent Gbagbo a été arrêté au terme d’une longue crise post-électorale débutée le soir du second tour de l’élection présidentielle censée mettre fin à la crise politico-militaire qui a vu le jour le 19 septembre 2002.
Il faut pourtant accepter de marquer, cette page noire, non d’un tissu noir de l’oubli, mais d’un pagne blanc du souvenir.
Ce 11 avril 2019, la Côte d’Ivoire doit reconnaître les torts causés aux uns et aux autres, au nom de l’Etat, au nom de la continuité des affaires de l’Etat, afin de réconcilier ses filles et ses fils, et recoudre le tissu de l’unité nationale, déchiré par nos turpitudes et par nos ambitions démesurées. C’est mon avis.
Le 11 avril 2011, Laurent Gbagbo, peu après 16h GMT, confessant son échec par sa défaite militaire, avait appelé à privilégier l’unique solution qui s’offrait désormais aux dirigeants pour sortir de la crise : la voie politique.
Le règlement d’une crise par la voie politique passe nécessairement par un dialogue franc entre les principaux acteurs du moment. Forts ou faibles, les acteurs politiques d’un pays doivent parvenir à s’asseoir autour d’une table pour dialoguer et trouver des solutions durables aux blocages.
En janvier 2003, le dialogue entre les Ivoiriens avait triomphé à Linas Marcoussis avec la signature de l’accord politique qui permit de mettre sur pied le gouvernement de réconciliation nationale dirigé par le Premier ministre Seydou Élimane Diarra, à qui je tiens ici à rendre un vibrant hommage, malgré les coups physiques et politiques reçus à un moment de l’histoire de notre pays.
De janvier à mars 2007, c’est par le dialogue que le président Laurent Gbagbo et le Premier ministre Guillaume Soro parvinrent à sceller l’accord politique de Ouagadougou, sans lequel, ne l’oublions pas, le pays n’aurait pu être réunifié et l’élection présidentielle d’octobre et novembre 2010 n’aurait été possible. L’accord politique de Ouagadougou a été rendu possible grâce à la volonté politique de Laurent Gbagbo et de Guillaume Soro, qui ont accepté de confier le dossier de la crise ivoirienne à l’ancien Président du Burkina Faso, sans lequel rien n’aurait été signé.
Si les résultats de cette élection avaient été reconnus par chaque camp, notre pays aurait pu faire l’économie du décompte macabre de centaines voire de milliers de victimes aujourd’hui brandies ici et là comme la preuve d’une impossible réconciliation. Et pourtant, il y a nécessité, en ce jour du souvenir, d’engager la Côte d’Ivoire, notre pays commun, sur les sentiers d’une Réconciliation sincère et juste.
Pour moi, Député de la Nation, huit (8) ans après le 11 avril 2011, il faut appeler à une prise de responsabilité collective, notamment au sommet de l’Etat, afin que triomphent les secrets d’un nouveau dialogue direct entre les Présidents Alassane Ouattara, Gbagbo Laurent, Soro Guillaume et Henri Konan Bédié.
Ce dialogue direct s’impose dès lors que la Justice internationale a rendu son verdict en ordonnant la libération de nos frères Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé dont les destins se conjuguent avec celui de la Côte d’Ivoire.
Le dialogue, en vue de la réconciliation nationale, doit être rendu possible et effectif en Côte d’Ivoire par le retour dans leur pays de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé.
Le Président de la République, le Gouvernement et toute la classe politique doivent s’engager à faire rentrer chez eux ces deux fils de Côte d’Ivoire et tous les autres Ivoiriens en exil ou encore détenus dans les prisons nationales.
Ce sera la meilleure façon d’ouvrir la voie du règlement politique et pacifique de cette crise qui n’a que trop duré et que nous rappelle chaque année la date du 11 avril.
Malgré nos divergences d’opinions sur la gestion actuelle des affaires de l’Etat, malgré nos bords politiques différents, nous devons tous, comme les pères fondateurs de la République de Côte d’Ivoire, marquer d’une pierre blanche, le 11 avril.
La Côte d’Ivoire en a les moyens. Les Ivoiriens pris dans leurs diversités attendent ce moment. Je me suis exprimé pour le 11 avril 2019 en mémoire de toutes les victimes de nos erreurs, pour lesquelles j’ai demandé Pardon et je ne cesserai de demander Pardon en tant qu’acteur et témoin.
Alain LOBOGNON,
Député de la Nation