Hamed Bakayoko, l’ancien Premier ministre de Côte d’Ivoire, décédé le 10 mars passé, avait quelque chose qui le prédestinait à un encore plus grand destin.
Bientôt 5 mois qu’ Hamed Bakayoko est mort
Oui, cela fera déjà 5 mois qu’ Hamed Bakayoko aura attristé les Ivoiriens. Nommé Premier ministre en remplacement de feu Amadou Gon Coulibaly le 8 juillet 2020, Hamback n’aura tenu les commandes du pays que 7 petits mois avant l’aggravation du mal qui va ensuite l’arracher à l’affection de tout un pays le 10 mars 2021.
Ce grand gaillard qui mettait tout le monde d’accord sur sa bonté, adversaires politiques comme camarades de lutte, du monde des arts aux simples citoyens qui croisaient son chemin, avait toujours à coeur de marquer positivement l’esprit de tout un chacun. Un homme d’une rare bonté, une générosité qu’il cultivait d’ailleurs sans complexe.
Ce grand Monsieur, pas que par la taille, s’en est allé bien trop tôt. Ce décès d’ Hamed Bakayoko a laissé un grand vide dans la classe politique ivoirienne et il a surtout privé le Président Alassane Ouattara de son deuxième fidèle après le décès d’ Amadou Gon Coulibaly. À bientôt 5 mois de sa mort le 10 août prochain, difficile de ne pas déjà revenir sur cette triste disparition qui prive Abobo de son maire le plus charismatique.
Il n’aura échappé à personne qu’ Hamed Bakayoko se préparait à la fonction de Président de la République de Côte d’Ivoire après le nouveau mandat d’Alassane Ouattara. Il avait pour ce faire, activé tous ses réseaux politiques en Côte d’Ivoire et à l’étranger peu après sa nomination.
Et visiblement, Hamback ne comptait pas marcher simplement dans les traces de son mentor, l’actuel Président ivoirien; il voulait laisser un nom, un souvenir encore plus grand, celui de l’homme venu de nulle part qui aura positionné la Côte d’Ivoire dans une autre dimension.
Le « demi-dieu » à l’initiative de la réconciliation
L’ancien Premier ministre pensait non seulement régler à sa façon la question de la réconciliation nationale, c’est-à-dire travailler à un accord entre tous les grands politiciens ivoiriens. Il avait pour ce faire, initié les premiers contacts avec le Président Laurent Gbagbo depuis la Cour Pénale Internationale (CPI) à La Haye, puis lorsqu’il était en Belgique.
C’est même à lui que le futur ex-époux de Simone Ehivet Gbagbo a donné le nom d’Assoa Adou comme étant le bon interlocuteur pour traiter de son cas. M. Guillaume Soro, qui a été présenté dans la grande famille RDR comme étant son ennemi juré, n’était pas en dehors de son plan de réconciliation entre Ivoiriens.
Ancien militant du PDCI RDA, Hamback n’a jamais vraiment tourné dos à ses camarades du plus vieux parti politique de Côte d’Ivoire. Beaucoup de personnes au FPI lui doivent aussi leur retour au pays après la grave crise politico-militaire qui les avait contraints à l’exil dans les pays voisins.
Hamed Bakayoko savait, à l’ivoirienne, arracher l’adhésion à une position à ses interlocuteurs par sa simplicité. Alors qu’un jeune ivoirien avait été décapité, et que les tensions grossissaient dans le pays tout entier, il ne se démonte pas pour aller tenir un discours de vérité aux jeunes de Bonoua.
« Quand nous les acteurs, hommes politiques, faisons nos arrangements, nos accords politiques, on ne vous appelle pas. Quand c’est bon entre nous en haut là bas, on ne vous appelle pas. Mais lorsqu’on a des désaccords, c’est là qu’on vous appelle pour que vous puissiez forcer, par des batailles de rues ces désaccords. Vous devez dire non à la violence, vous devez dire non à la manipulation », leur dira-t-il.
Aucun homme politique encore en activité n’avait aussi clairement parlé à la jeunesse ivoirienne. Rien que par ce discours, Hamback a forcément désarmé les coeurs de certains jeunes de Bonoua prêts à en découdre avec les autres communautés. Depuis son passage dans cette ville proche d’Abidjan, le calme est revenu dans cette localité. Par son discours simple, l’ancien Premier ministre de Côte d’Ivoire venait de montrer sa capacité à éteindre le « feu » qui commençait à devenir un vrai « brazier ».
Le « Golden boy » mieux qu’une élite
Si les hommes politiques africains et ivoiriens sont généralement issus de l’élite, ce qui parfois ne leur donne pas envie de se mélanger à la masse, sauf en temps d’élection, Hamed Bakayoko n’avait pas ce problème-là. Il pouvait serrer la main aussi bien à un Président venu de l’autre bout de monde, qu’à n’importe quel jeune des quartiers.
Hamback aurait pu être un vrai vecteur de paix et son parcours montre qu’il n’aurait pas laissé le pays dans l’état s’il avait vécu plus longtemps. Il a toujours eu ce besoin de prouver qu’il pouvait faire aussi bien que les autres si ce n’est mieux.
Si beaucoup ont longtemps cherché à le handicaper politiquement avec son faible niveau intellectuel, ses passages dans les différents ministères ont vite montré que les diplômes ne veulent plus rien dire pour un homme comme lui. C’est le travail à faire qui comptait et c’était là sa force.
La boulimie dont il faisait preuve dans son envie de toujours aider son prochain est l’autre signe qui montre qu’il aurait pu sortir beaucoup de jeunes ivoiriens de situations difficiles. Même si les politiciens semblent décidés à poursuivre le dialogue direct qu’il a initié avant sa mort brutale, le petit peuple ivoirien aurait eu plus confiance s’il était encore là pour la proximité qu’il avait avec chaque leader politique.
La mort n’arrête pas l’amour. Demi-dieu pour toujours. »Repose en paix le Golden boy ».